Pourquoi est-il nécessaire pour mon cheval de faire une transition douce du pâturage au box à l’entrée de l’hiver ?

À l’arrivée de l’hiver, les chevaux sont souvent rentrés au box la journée ou la nuit. Cela rime aussi souvent avec un changement de régime alimentaire. Quel est l’impact de cette transition pour le cheval ? Et son système digestif ? Cet article fait la lumière sur ce sujet …

On ne le répètera jamais assez, lors d’un changement de régime alimentaire : pensez à faire une transition d’au moins 10 jours ! Et le changement de mode de vie lié aux conditions climatiques n’y coupe pas … explications un peu plus bas !

Passage d’une alimentation à l’herbe à une alimentation à base de concentrés : quels risques ?

Une modification abrupte de la ration amène un changement des nutriments pour la flore microbienne du gros intestin et donc un changement de cette flore.

En effet, des études ont montré que 5 heures après un changement de ration la flore avait déjà changée. Celle-ci à tendance, lorsque des céréales ou concentrés sont apportés, à augmenter en bactéries amylolytiques et utilisatrices de lactates et à diminuer en bactéries fibrolytiques et cellulolytiques.

On voit alors augmenter la concentration en lactate et une diminution de l’acétate et du butyrate par rapport au propionate (tous des acides gras résultant de la fermentation des bactéries). Cette modification des proportions des produits de la fermentation amène en général une baisse du pH du gros intestin, ce qui n’est pas propice aux bactéries fibrolytiques.

Néanmoins, ce changement peut être temporaire, l’écosystème bactérien est relativement résilient et est capable de supporter de légère variation, en général après une semaine, l’équilibre microbien peut être revenu à la normale. Cependant, si le changement est trop brutal et l’écosystème bactérien sensible, le changement peut provoquer de graves conséquences pour la santé du cheval. En effet, cette diminution du pH peut provoquer la mort rapide de nombreuses bactéries fibrolytiques, ce qui peut produire de nombreuses toxines et favoriser l’apparition de diarrhée ou fourbure . Autrement, le changement dans l’équilibre peut aussi augmenter la production de gaz ou diminuer la digestion des fibres, engendrant ainsi des coliques.

Passage d’une alimentation à l’herbe à des fourrages secs : quels risques ?

Si les fourrages ont une composition floristique similaire à la prairie, à priori cela ne provoque pas d’énormes changements pour la flore bactérienne. La richesse en sucre de la prairie durant l’automne a tendance à diminuer, ce qui permet une transition douce avec les fourrages secs. Il faut porter un point de vigilance aux fourrages tels que les enrubannées car ils sont souvent très riches en énergie et sucres, et ils sont donc à apporter de façon mesurée.

Changement de comportement alimentaire : quels sont les points de vigilance ?

Comme je l’ai écrit précédemment, la richesse de la prairie diminue durant l’automne, elle devient petit à petit moins appétente. Donc, si du jour au lendemain, on apporte au cheval un repas très appétant et volumineux, il risque de le manger très vite et de moins mastiquer. Ce comportement provoque en général des bouchons œsophagiens, douloureux et dangereux pour le cheval qui ne peut pas vomir. Le changement de l’herbe au foin peut aussi amener le cheval à faire plus de pause et à manger moins de fourrages en attendant les repas de concentrés, ce qui n’est pas en accord avec son fonctionnement digestif.

De plus, un changement brutal de son environnement et de ses habitudes peut provoquer un grand stress pour le cheval, et être facteur de risques d’apparition de stéréotypies ou de problèmes de santé.

Il peut être nécessaire de faire rentrer le cheval au box et d’arrêter le pâturage pendant l’hiver, mais il est important de le faire de manière douce. Ainsi, à l’automne encore doux, il peut être intéressant de commencer à le nourrir avec un peu d’aliment au champ et de changer les habitudes du cheval petit à petit. Et ça marche aussi dans l’autre sens, au printemps !

Source :
V. Julliand, P. Grimm, 2017. The Impact of Diet on the Hindgut Microbiome. Journal of Equine Veterinary Science, 23–28.
M. van den Berg, S. O.Hoskin, C. W.Rogers, A. Grinberg, 2013. Fecal pH and Microbial Populations in Thoroughbred Horses During Transition from Pasture to Concentrate Feeding. Journal of Equine Veterinary Science, 215-222.

Suzie Bathellier
Chef de produit