Chez certaines espèces animales, le jeune naît prêt à affronter les dangers de la vie hors du ventre de sa mère. Ce n’est pas le cas chez le cheval car le poulain vient au monde sans y être tout à fait préparé. Le temps nécessaire à l’acquisition des capacités de résistance aux agressions du monde extérieur est appelé période d’adaptation. Il s’agit d’une phase dangereuse que l’éleveur doit surveiller avec attention.

Dès la naissance, les organes du nouveau-né sont sollicités de manière bien différente que lors de la vie intra-utérine. Les poumons, dont le surfactant nécessaire aux échanges gazeux s’est mis en place dans les tout derniers jours de la gestation, étaient jusqu’à présent remplis de liquide amniotique. C’est probablement l’hypoxie lors du passage dans le bassin maternel ainsi que le changement de gravité qui déclenchent la première respiration. 24 heures sont nécessaires pour que le système circulatoire finisse sa maturation. La pression sanguine augmente, ce qui stimule les fonctions urinaires. C’est pourquoi le poulain urine fréquemment et abondamment. A la naissance, le gros intestin contient du méconium, conglomérat de débris tissulaires et de sécrétions, sous forme de petites crottes dures et sombres. Après leur expulsion parfois difficile, les selles ramollissent et s’éclaircissent à cause du lait digéré. Progressivement, le système digestif totalement stérile va être colonisé par les bactéries environnantes, surtout celles contenues dans les crottins maternels. Ainsi, une flore bactérienne permettant l’exploitation de la cellulose végétale se met en place en l’espace de trois mois environ. Le système locomoteur non plus n’est guère fonctionnel. Les tendons sont très mous, les os plutôt élastiques. Cependant, la plus importante difficulté à surmonter par le nouveau-né est l’absence de défenses immunitaires

 

L’adaptation se déroule-t-elle normalement ?

Il est difficile, surtout si on assiste à son premier poulinage, de savoir si le poulain est normal. L’éleveur doit savoir être patient : au début, le poulain est tout juste capable de se mettre sur le sternum. Si le cordon n’est pas rompu, ce temps est mis à profit pour récupérer une grande partie du sang encore contenu dans le placenta. Le réflexe de succion peut être provoqué à la main au bout de 10 min environ puis les premières tentatives pour se mettre debout se succèdent, alternées par des phases de repos. Mais il faudra compter d’une à deux heures avant qu’elles soient couronnées de succès ! Dès que le poulain à réussi à tenir sur ses jambes, il part à la recherche des mamelles. Maladroit, il ne réussit pas à s’y accrocher du premier coup et c’est normal, puisqu’il lui faut encore une à deux heures avant d’y réussir. L’éleveur pour soutirer à la mère 500 à 750 ml de colostrum, si celui-ci s’écoule sur la paille, pour l’administrer au biberon ou à la sonde au petit. Il faut donc quelques heures avant que le foal soit vif et qu’il se nourrisse régulièrement. Mais même l’observation d’un tel poulain ne signifie pas que tout va bien, car les signes de maladies peuvent apparaître plus tard.


Anomalies du nouveau-né

Un des premiers critères est d’évaluer si le poulain est né à terme ou pas. En effet, plus le poulain sera prématuré, plus il sera fragile. D’ailleurs, les grands prématurés ont très peu de chance de survie. Les signes d’immaturité sont une durée de la gestation inférieure à 320 jours, un poulain chétif avec un poil soyeux, des membres souples et déformés, une tête au crâne bombé. Un tel poulain devra faire l’objet de soins particuliers. Il en est ainsi également pour les foals ayant été privés d’oxygène au moment du poulinage et qui souffrent d’un syndrome d’asphyxique peripartum.
D’autres signes anormaux sont dépistables précocement. Les plus spectaculaires sont les défauts de développement embryonnaire : hydrocéphalie, absence de fermeture de l’abdomen, malformation. Dans ces cas, il faut envisager une euthanasie rapide. Plus discrète, la présence de lait ressortant par les narines lorsque le poulain tête doit orienter vers une anomalie du palais ou de l’œsophage. Les anomalies oculaires (enroulement des paupières, yeux de taille différente) sont aussi observables facilement avec une gravité variable. Une chose tracasse souvent le naisseur,  ce sont les défauts d’aplomb. Beaucoup de poulain naissent avec des membres qui ne sont pas rectilignes, des tendons trop souples et des boulets qui touchent le sol, ou au contraire avec des membres trop droits. Pas de panique, ces troubles, quand ils sont discrets, disparaissent souvent spontanément en quelques jours ! En revanche, s’ils sont marqués ou s’ils perdurent, un traitement médical et orthopédique doit être instauré.


Maladies acquises

En dehors de ces anomalies congénitales, le poulain peut souffrir de bien des affections acquises, dont certaines sont assez fréquentes. L’éleveur doit être attentif aux signes qui en annoncent la survenue.


Les affections respiratoires sont difficiles à détecter, car la toux est rare et les écoulements aux naseaux quasi inexistants. Souvent la température est basse et c’est finalement l’auscultation qui permet le diagnostic. Leur cause est physique par inhalation de méconium lors du poulinage, avec peu de conséquences, on inhalation de lait lors de gavage forcé, de sonde naso-oesophagienne mal positionnée ou laissée trop longtemps en place, d’anomalies du palais ou de troubles moteurs. Cette inhalation de lait est hélas souvent mortelle. Parfois les pneumonies sont bactériennes, virales ou fongiques, mais cela est relativement rare et souvent lié à un déficit immunitaire.


La rétention du méconium est plus fréquente chez les mâles que chez les femelles car leur bassin est plus étroit. Le foal fait des efforts expulsifs infructueux et exprime des signes de coliques : il se roule, se regarde les flancs … S’il n’est pas évacué spontanément, le méconium doit être retiré au doigt délicatement, aidé en cela par des laxatifs. Attention aux perforations rectales !


Si les anticorps maternels transmis par le colostrum sont incompatibles avec le sang du poulain (problème de groupe sanguin), la muqueuse buccale et les conjonctives deviennent jaunes car les globules rouges sont détruits. Cela s’appelle un ictère hémolytique et nécessite parfois une transfusion. Un ictère peut aussi être observée lors d’infection généralisée, appelée septicémie.
Autre point à surveiller, la fonction urinaire. Les problèmes peuvent survenir de deux manières. La première est la persistance du canal de l’ouraque, canal qui relie la vessie au nombril et qui doit se fermer dès la rupture du cordon ombilical. En cas d’anomalie, de l’urine s’écoule par l’ombilic. Ce n’est pas une affection très grave, même si elle nécessite parfois une intervention chirurgicale. Le second problème urinaire possible est l’uropéritoine. A cause d’une fissure de la vessie apparue lors du poulinage, ou bien une anomalie des voies urinaires, de l’urine s’accumule dans l’abdomen du petit. Si la fuite est importante, les premiers symptômes sont observables en 24 à 48 heures. Dans le cas contraire, le délai est de trois à quatre jours. Le poulain est en mauvaise forme, faible et son comportement de tétée est différent. Il se met fréquemment en position pour uriner, fait des efforts mais n’émet que de faibles quantités d’urine. L’abdomen se distend progressivement. Une correction chirurgicale du problème, quand elle est possible, est indispensable.

Il ne s’agit pas là bien entendu d’une liste exhaustive des maladies pouvant atteindre le foal. En cas de doute, il ne faut pas hésiter à avoir recours au vétérinaire, tout retard pris dans le traitement de cet être fragile pouvant d’avérer désastreux. Mais les soins médicaux ne sont rien dans les précautions élémentaires que sont « les petits soins » à apporter au poulain : environnement propre, paille fraîche, chaleur et douceur.

Anaël MARZIN
Responsable marché Equideos